Et si l’un des leviers les plus puissants du management ne coûtait rien ?
- Audrey Martine
- 12 juin
- 4 min de lecture

Et si notre plus grand pouvoir relationnel se jouait parfois en un mot, une attention, un regard ?
Dans cet article, je vous parle d’un levier humain aussi simple que sous-estimé : les strokes ou signes de reconnaissance. Ces gestes invisibles mais puissants qui peuvent faire toute la différence dans une relation, une équipe, une organisation.
Pas besoin d'en faire trop, juste d'en faire. Et, pour reprendre les propos d'Eric Berne, psychiatre américain, fondateur de l'analyse transactionnelle :
"Les signes de reconnaissance sont aussi essentiels pour le bien-être psychologique que la nourriture l’est pour le corps."
Mais alors, qu’est-ce qu’un "stroke" ?
En Analyse Transactionnelle, Eric Berne définit le stroke comme une unité d’attention, un «je te vois».
C’est un geste, un mot, un regard qui dit : "Tu existes pour moi. Ce que tu fais a de la valeur."
Il peut être :
Verbal ou non verbal,
Positif ou négatif (quand il reste respectueux),
Conditionnel (lié à ce que tu fais) ou inconditionnel (lié à ce que tu es).
Un stroke n’est pas un compliment gratuit. C’est une attention ciblée, sincère, qui nourrit la relation, la confiance, l’estime de soi. En entreprise, il peut devenir un véritable outil de management : facteur de motivation, de confiance, de reconnaissance.
Une nourriture invisible mais vitale
Eric Berne le rappelait : "En l’absence de signes de reconnaissance, la moelle épinière se flétrit."
Sans reconnaissance, on s’éteint. Avec, on s’épanouit.
Alors qu'est-ce qui nous retient?
Claude Steiner, collaborateur de Berne, a identifié 5 croyances limitantes souvent acquises dans l’enfance :
Ne donne pas de reconnaissance
Ne demande pas
Ne la reçois "pas trop"
Ne refuse pas, même si c’est toxique
Ne t’en donne pas à toi-même
Ces règles (inconscientes) s’infiltrent aussi dans nos entreprises, nos organisations. On minimise alors les feedbacks positifs, de peur de “gonfler les egos”. On retient les remerciements. On tait parfois la fierté, par souci de pudeur ou de neutralité. Et petit à petit, les équipes se dessèchent. Le lien se fragilise.
Mieux vaut un stroke négatif que l'indifférence
Même un stroke négatif – s’il est exprimé avec clarté et respect – permet la reconnaissance.
Il signifie : “Je te vois. Ce que tu fais m’impacte. Notre lien existe.”
C’est un acte relationnel, là où le silence installe le vide.
Ainsi, l’absence de tout signe crée un flou anxiogène. Le collaborateur doute, s’isole, se met en retrait. Il finit par “faire le job”… sans élan, sans engagement, sans envie.
Réenclencher le cercle vertueux : 5 réflexes simples
Voici 5 réflexes à cultiver, en équipe comme dans la vie pour remettre la reconnaissance au quotidien :
1. Donner
Un stroke proportionné, sincère, personnalisé, ça booste la motivation et la confiance.
« J’ai aimé ta manière de recadrer sans écraser. »« Merci pour ta disponibilité cette semaine, ça a vraiment fluidifié notre organisation. »
2. Recevoir
Accueillir pleinement sans tout saboter derrière. (Pas de "oh c’est rien" ! « c’est normal ») et accepter la critique lorsqu'elle est bienveillante et constructive c'est aussi s'enrichir et grandir.
Un coach m’a dit un jour « accepter de recevoir c’est aussi accepter de « se voir » ».
3. Refuser
Un stroke non adapté, flou, malveillant ? Savoir le refuser, se respecter c’est aussi ça.
4. Demander
Besoin d’un retour ? D’un éclairage ? Etre en capacité de le demander. Ce n’est pas de la faiblesse, c’est aussi notre responsabilité personnelle.
5. S'en offrir à soi-même
Savoir se féliciter. Se regarder avec bienveillance sans que cela soit « narcissique ».
En entreprise : un levier relationnel puissant !
Un manager, un leader qui sait donner des signes clairs, justes et humains active :
L’engagement durable
Un climat de confiance
La coopération et l’élan collectif
La valorisation des talents
Une motivation plus profonde
Et vous quel dirigeant-manager-leader êtes-vous ?
Pensez au dernier stroke sincère que vous avez reçu : quel effet a-t-il eu sur vous ?
Et êtes-vous à l’aise pour les recevoir ? les donner ? les demander ?
Quel est le dernier stroke que vous avez donné ?
Ce qui fait un bon stroke : les 5 qualités à retenir
Un bon signe de reconnaissance n’est ni un compliment creux, ni une injonction bien-pensante. Il est :
Spécifique :lié à un fait, un comportement, un contexte
Adapté :à la capacité de réception de l’autre, pas besoin d'en faire "des tonnes"
Sincère : ressenti, congruent, vrai
Timé : proche de l’événement
Personnalisé : non générique, destiné à une personne et en utilisant le "je"
Une énergie relationnelle renouvelable, puissante, simple.
Un stroke bien formulé ne prend que quelques secondes mais il peut marquer une journée, une personne, parfois même, une carrière.
Qui n’a jamais entendu le témoignage d'un dirigeant, un leader, ou une personnalité raconter : « Ce jour-là, quelqu’un m’a dit "...", et cela a eu impact, cela m'a fait un déclic » ? Parfois, une seule phrase suffit à ouvrir une voie, restaurer la confiance ou déclencher un élan.
On ne sera jamais à court de sourires, de feedbacks honnêtes, de mots doux ou francs.
Donnons, recevons, partageons. Remettons du vivant dans nos interactions et souvenons nous : ce n’est pas du « bonus », c’est le cœur du lien humain.
Pour aller plus loin, je vous invite à (re)lire "Le conte chaud et doux des chaudoudoux" de Claude Steiner : une métaphore éclairante.

Dans un monde imaginaire, chaque être humain possède un sac de « chaudoudoux », de petites marques d’attention chaleureuses. Tout allait bien, jusqu’au jour où une rumeur se propagea : « Si tu donnes trop de chaudoudoux, tu n’en auras plus. » Alors les gens se mirent à économiser, à se méfier, à garder pour eux. Le monde devint froid, méfiant…
Moralité ? Le stroke est illimité. Plus on en donne, plus il circule. Et plus il circule, plus il crée un environnement propice à l’engagement, à la coopération, à la créativité.
Et vous, à qui pourriez-vous offrir un vrai signe de reconnaissance aujourd’hui ?